Accueil > Enseigner > Lycée > Lycée voie générale > Archives > Anciens programmes > Deux chansons pour traiter des mémoires de la Seconde Guerre Mondiale en France

Ancien programme de Terminale.

Deux chansons pour traiter des mémoires de la Seconde Guerre Mondiale en France

Histoire Terminale

mercredi 26 janvier 2011

On peut commencer par expliquer aux élèves la différence entre mémoire et histoire :

 faire de l’histoire, c’est essayer de reconstituer le passé à partir des traces qu’il a laissé et que l’on appelle : les sources

=> il n’y a pas d’histoire sans sources et on peut même dire sans des sources multiples que l’on puisse recouper

 l’histoire ne vise pas à juger mais à comprendre afin d’expliquer le passé

 la mémoire renvoie aux souvenirs qu’a un individu, où un groupe, du passé qu’il a vécu

=> elle est inséparable de l’affectif
=> elle aboutit parfois au mythe ou à la sacralisation

ex. il est très difficile d’aborder avec certaines personnes certaines périodes du passé sans susciter des réactions parfois très vives, ainsi la guerre d’Algérie

 la mémoire se transforme en permanence au sein des individus ou des groupes

On peut étudier la mémoire de la déportation et ses évolutions à partir de deux chansons « Nuit et brouillard » de Jean Ferrat écrite en 1963 et « Comme toi » de Jean-Jacques Goldman rédigée en 1982. (Voir paroles sous forme de document joint au format pdf. Leur utilisation pour un usage éducatif est légal)

Les deux chansons évoquent la déportation et la mort dans les camps de concentration nazis mais sont construites de manière très différente :
 la chanson de Ferrat annonce d’emblée par son titre de quoi elle va parler et n’hésite pas à évoquer la violence de la déportation et de la vie en camp (strophe 6).
 la chanson de J.J.Goldman commence de manière anodine et ce n’est qu’à partir de la deuxième strophe que l’on comprend qu’il parle d’une petite fille juive polonaise réfugiée en France avec sa famille. La musique confirme cela avec le morceau de violon, air traditionnel de la musique yeddish entre la 2e et le 3e strophe. L’émotion apparaît à la 3e strophe qui suggère que la petite fille a été arrêtée avec sa famille et déportée.

Les deux chanteurs ont des points communs : ils sont issu d’une famille juive :
le père de Jean Ferrat était un juif russe émigré en France et naturalisé français en 1928. En 1942, quand Jean a 11 ans, il sera arrêté et déporté à Auschwitz.

La mère de JJ.Goldman était une juive allemande et son père un juif polonais. Réfugiés en France, ils ont participé activement à la résistance

Cependant, les 2 chanteurs n’appartiennent pas à la même génération : Jean Ferrat est né en 1930 alors que JJ.Goldman est né en 1951.

=> ils incarnent 2 mémoires de la déportation qui correspondent à deux moments de l’évolution de cette mémoire
 dans la chanson de J.Ferrat : les juifs sont des déportés parmi d’autres
 J.J.Goldman évoque lui le caractère spécifique de la déportation des juifs : extermination d’hommes et de femmes pour ce qu’ils sont non pour ce qu’ils ont fait

Au lendemain de la guerre, les déportés juifs revendiquent leur qualité d’hommes et de femmes qui leur a été niée par les nazis, il entendent donc ne pas être distingués des autres. Progressivement, dans les décennies qui suivent s’impose l’idée de la spécificité de la shoah.